Histoire du château de l'Étang
L'étang, une source d'eau convoitée
Abritée par de grands arbres, à la croisée des rues François-Mitterrand et Sadi-Carnot, se dresse une imposante demeure bourgeoise. La bâtisse fin 19e est connue, à Bagnolet, sous le nom de « château de l'Étang ».
Dénomination qui peut aujourd'hui paraître étrange étant donné l'absence de pièce d'eau dans le parc. Mais, ce serait faire l'impasse sur l'histoire des lieux. En effet, autrefois, bien avant la construction du « château » une partie importante du terrain abritait une glaisière dans laquelle le ruissellement des eaux de pluies et des sources se déversait, formant... un étang. Le terrain a connu plusieurs propriétaires au fil du temps. Car l'eau de l'étang est convoitée pour de multiples raisons.
En effet, l'eau de l'étang, et ce dès 1606, alimente plus bas la demeure du seigneur de Bagnolet, Étienne Regnault. Son château était situé au niveau de l'actuel Novotel, il n'en reste ajourd'hui que le pavillon de l'Hermitage. En 1727, si la parcelle de terrain où se dresse l'actuel «château de l'Étang» est en partie propriété de Denis Girardot, fils du promoteur de la culture de la pêche en espalier, qui y a fait construire sa maison dite « la Pidoux », la pièce d'eau appartient en partie à la Duchesse d'Orléans. En effet, celle-ci possède dans le sud-est du village un imposant château et l'eau de l'étang permet d'alimenter les fontaines de son parc. Plus tard, la destruction du château de Bagnolet entraîne la désaffection des eaux de l'étang. Celles-ci se perdent dans les anciennes canalisations et inondent souvent la Grand-rue, ce qui permet de la maintenir à peu près propre en été, l'eau courante permettant l'évacuation des immondices. Mais, en hiver le gel la rend dangereusement glissante. Ainsi, un garde champêtre est-il, au début du XIXe siècle, chargé d'ouvrir et de fermer les vannes de l'étang.
En 1812, le propriétaire du terrain propose de céder une partie de son eau à la ville. Sans suite, les sommes réclamées étant trop importantes. Enfin, l'eau de l'étang sert à alimenter la machine à Vapeur de l'usine de savon de M. Schweitzer. Au grand dam des riverains, qui pétitionnent contre lui en 1898, l'étang constituant un foyer d'infection.
Le destin mouvementé du château
Lorsque le rentier Charles Frédéric Bühler rachète le terrain en 1873, il y fait construire l'imposante bâtisse que l'on connaît. Mais surtout, il fait aménager autour un parc arboré dans le style romantique de l'époque. Autour de l'étang s'étendent, outre une serre et des jardins potagers, une grotte artificielle et des petits pavillons. Les fils du rentier proposent, à la mort de celui-ci en 1933, de céder la propriété à la ville, à condition qu'elle soit affectée à un parc, un dispensaire, un sanatorium ou un hospice de vieillards. Les négociations traînent entre la mairie communiste et les héritiers, c'est finalement en 1942 que la commune, alors que la ville est administrée par la délégation spéciale, installée par le gouvernement de Vichy, que la vente est conclue.
Après la guerre, les lieux sont dédiés à la jeunesse. Au travers de l'Union des Jeunes de Bagnolet, les petits bagnoletais peuvent se divertir, apprendre un métier ou un sport. Entre temps, en 1950, suite à la noyade d'un jeune garçon, l'étang est comblé. 1963 voit la transformation de la structure en Maison des Jeunes et de la Culture. Dans les années 1970, l'OMJB (Office Municipal de la Jeunesse de Bagnolet) et le centre culturel municipal occupent les lieux. Plusieurs manifestations culturelles (représentations théâtrales, concert etc.) y prennent corps, particulièrement dans le parc. Sous l'impulsion de l'ancien maire Jacqueline Chonavel, le château devient, en 1988, après de nombreux travaux, la maison de la petite enfance. En 2003, l'aménagement de la zone attenante au château, anciennement laissée en friche est terminé. Les Bagnoletais peuvent alors bénéficier d'un coin de verdure de 3 ha en plein centre ville bénéficiant d'une esthétique soignée et permettant de nombreuses activités.
Ce lieu emblématique du patrimoine de la ville a été entièrement rénové en 2011.
Le 7 juillet 2019, la Municipalité a décidé d’honorer la mémoire de Josette et Maurice Audin en donnant leur nom au parc.
Maurice Audin, mathématicien, fut un grand combattant de la liberté. Arbitrairement arrêté par l'Etat français, il fut torturé et assasiné par l'armée française en 1957. Josette Audin, professeur de mathématiques, installée à Bagnolet depuis 1992, elle consacra son existence à ce que la vérité soit faire sur l'assassinat de son mari et sur la pratique de la torture pendant la guerre d'Algérie. Le 13 septembre 2018, elle obtint que le Président de la République française reconnaisse la responsabilité de l'Etat dans les crimes dont son époux a été une victime parmi des milliers d'Algériens.